Le défaut de consultation du CSE en cas d’inaptitude d’origine non professionnelle prive-t-il le licenciement de cause réelle et sérieuse ?
Oui !
Un employeur est tenu d’organiser une visite médicale de reprise auprès de la médecine du travail au terme de l’arrêt de travail d’un salarié, et au plus tard dans les huit jours suivant la reprise, lié à :
- un congé maternité ;
- un arrêt de travail d’au moins trente jours suite à un accident du travail ;
- une maladie professionnelle quelle que soit sa durée ;
- un arrêt maladie ou accident d’origine non professionnel d’au moins trente jours.
Seule cette visite médicale met fin juridiquement à la suspension du contrat de travail. A l’issue de cet examen médical, le médecin du travail se prononce sur l’aptitude ou non du salarié à reprendre son poste de travail. Si le médecin du travail mentionne expressément dans son avis que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé de ce dernier fait obstacle à tout reclassement au sein de l’entreprise », l’employeur peut procéder au licenciement du salarié sans tenter de le reclasser.
Si le médecin du travail déclare le salarié inapte à reprendre le poste qu’il occupait précédemment, l’employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient. Il devra tenir compte des préconisations et recommandations du médecin du travail, notamment en mettant en œuvre des mesures telles que des aménagements du temps de travail, des aménagements ou adaptations des postes existants, etc. Pour effectuer ses recherches, un employeur peut solliciter le médecin du travail sur les possibilités de reclassement. Ces échanges peuvent être utilisés par l’employeur, en cas de contentieux, pour montrer qu’il a bien satisfait à son obligation. Néanmoins, la confirmation par le médecin du travail de l’inaptitude à tout poste lors de ces échanges ne dispense pas l’employeur de son obligation de recherche de reclassement.
Par ailleurs, l’employeur doit obligatoirement consulter les membres du Comité social et économique (CSE) sur les possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte quelle que soit l’origine de l’inaptitude du salarié. La consultation doit avoir lieu avant que l’employeur fasse la proposition de reclassement au salarié et avant d’engager une éventuelle procédure de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Lorsque l’inaptitude est d’origine professionnelle (suite à un accident du travail ou maladie professionnelle) et que le licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié inapte, dont celles relatives à la consultation du CSE, le salarié a droit à une indemnité d’au moins 6 mois de salaires, quelle que soit son ancienneté ou la taille de l’entreprise. Cependant s’agissant de l’inaptitude non professionnelle, le Code du travail ne prévoit pas la sanction applicable au défaut de consultation du CSE.
Par un arrêt en date du 30 septembre 2020, la Cour de cassation a retenu que, dans le cadre d’une inaptitude d’origine non professionnelle, le licenciement prononcé sans consultation préalable des représentants du personnel est sans cause réelle et sérieuse. Il ouvre droit aux indemnités afférentes.
En l’espèce, un salarié avait été déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail. L’employeur l’avait licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Le salarié avait agi en justice pour contester son licenciement en reprochant à l’employeur de n’avoir pas consulté les représentants du personnel. Il soutenait que l’employeur n’avait donc pas respecté son obligation de reclassement. N’ayant pas obtenu gain de cause devant les juges du fond, il avait formé un pourvoi en cassation pour contester cette décision.
La Cour de cassation a censuré la décision des juges du fond. Elle rappelle que l’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail et après avis des représentants du personnel. La méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident ou une maladie d’origine non professionnelle, dont celle imposant à l’employeur de consulter les représentants du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.
Ainsi, lorsqu’un employeur licencie un salarié pour inaptitude non professionnelle sans avoir consulté les membres du CSE, le salarié peut prétendre aux indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Seule l’absence de CSE, ou en cas de carence, dans l’entreprise libère l’employeur de cette formalité préalable.
Consulter l’arrêt de la Cour de cassation en date du 30 septembre 2020 : https://www.courdecassation.fr/
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