Les échanges avec le médecin du travail, après un avis d’inaptitude, peuvent-il concourir à justifier l’impossibilité de reclassement du salarié inapte ?
Oui !
Un employeur est tenu d’organiser une visite médicale de reprise auprès de la médecine du travail au terme de l’arrêt de travail d’un salarié, et au plus tard dans les huit jours calendaires suivant la reprise, lié à :
- un congé maternité ;
- un accident de travail d’au moins trente jours ;
- une maladie professionnelle, quelle que soit sa durée ;
- un arrêt maladie ou accident d’origine non professionnel d’au moins soixante jours pour les arrêts de travail ayant débuté à compter du 1er avril 20224.
Seule la visite médicale de reprise met fin juridiquement à la suspension du contrat de travail. A l’issue de cet examen médical, le médecin du travail se prononce sur l’aptitude ou non du salarié à reprendre son poste de travail.
Si le médecin du travail mentionne expressément dans son avis que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé de ce dernier fait obstacle à tout reclassement au sein de l’entreprise », l’employeur peut procéder au licenciement du salarié sans tenter de le reclasser pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
En revanche, en dehors de ces deux exceptions, si le médecin du travail déclare le salarié inapte à tout poste, ou à reprendre le poste précédemment occupé, mais préconise des aménagements, l’employeur doit alors tenter de reclasser le salarié. Il doit tenir compte des préconisations et recommandations du médecin du travail, notamment en mettant en œuvre des mesures telles que des aménagements du temps de travail, des aménagements ou adaptations des postes existants, etc. L’employeur est tenu de consulter les membres du Comité économique et social (CSE) sur les postes de reclassement avant de les proposer au salarié concerné.
Pour effectuer ses recherches, un employeur peut solliciter le médecin du travail sur les possibilités de reclassement. Ces échanges peuvent être utilisés par l’employeur, en cas de contentieux, pour montrer qu’il a bien satisfait à son obligation de recherche de reclassement.
C’est ce qu’a retenu la Cour de cassation dans un arrêt en date du 1er mars 2023. En l’espèce, un salarié avait été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement après une visite médicale de reprise. Le salarié avait agi en justice pour contester son licenciement et le paiement de diverses indemnités. Les juges du fond avaient jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse en retenant que l’employeur ne justifiait pas avoir recherché des possibilités de reclassement par la mise en place de mesures d’aménagement, de transformations nécessaires dès lors que le salarié soutenait qu’il était possible d’adapter son poste de travail. L’employeur avait formé un pouvoir en cassation pour contester cette décision.
La Cour de cassation a censuré la décision des juges. Elle rappelle qu’en cas de déclaration d’inaptitude à son poste de travail, l’employeur doit proposer au salarié concerné un autre emploi approprié à ses capacités et que cette proposition doit prendre compte, après avis des représentants du personnel les conclusions écrites du médecin du travail et les indications formulées sur les capacités du salarié.
La Cour relève qu’après l’avis d’inaptitude, l’employeur avait sollicité le médecin du travail dans le cadre de ses recherches de reclassement. Elle retient alors que les réponses apportées, postérieurement à régulier de l’inaptitude, par le médecin du travail sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de remplir cette obligation.
Ainsi, les échanges établis par écrit, après l’avis d’inaptitude, sur les possibilités de reclassement peuvent justifier la réalité et loyauté des recherches effectuées par l’employeur dans le cadre de son obligation de recherche de reclassement.
Pour rappel, lorsque le reclassement du salarié est impossible, qu’aucun poste conforme aux préconisations du médecin du travail n’est disponible ou que le salarié refuse les postes proposés, l’employeur peut envisager le licenciement du salarié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Pour licencier le salarié, l’employeur doit respecter la procédure habituelle de licenciement pour motif personnel. Le salarié a droit à des indemnités de rupture du contrat de travail qui varient en fonction de l’origine de l’inaptitude.
Consulter l’arrêt de la Cour de cassation du 1er mars 2023 : https://urlz.fr/l3eq
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