Le versement d’une prime exceptionnelle aux salariés non-grévistes n’est pas nécessairement discriminatoire en cas de surcroit de travail.
Tout salarié, afin d’exprimer des revendications professionnelles collectives, bénéficient d’un droit de grève. Pour être licite, la grève doit réunir les 3 conditions suivantes :
- un arrêt total du travail ;
- un arrêt collectif du travail par l’ensemble des travailleurs grévistes. Pour être qualifié de grève, le mouvement doit être suivi par au moins deux personnes. Toutefois, un salarié peut faire grève seul s’il est l’unique salarié de l’entreprise ou s’il accompagne un appel à la grève lancé au niveau national ;
- la connaissance par l’employeur de revendications professionnelles qui peuvent porter par exemple sur le salaire, les conditions de travail ou encore la défense des droits.
A défaut, ce mouvement est considéré comme illicite. Dans ce cas, le salarié engagé dans ce mouvement n’est pas protégé par le droit de grève. Il s’expose à des sanctions disciplinaires.
Le salarié n’a pas l’obligation d’informer son employeur de son intention de faire grève, sauf s’il le souhaite. C’est à l’employeur de constater l’absence du salarié le jour de la grève et de lui demander les raisons de son absence.
En outre, dans le secteur privé, les salariés qui souhaitent exercer leur droit de grève ne sont pas tenus de respecter un préavis. Ils peuvent donc déclencher une grève sans avoir à attendre un refus de l’employeur ou à engager des démarches de conciliation préalables. En revanche, l’employeur doit connaitre les revendications professionnelles des salariés au moment du déclenchement de la grève. De même, il n’existe aucune durée légale minimale ou maximale pour une grève.
Par ailleurs, un salarié ne peut pas être sanctionné, ni subir une mesure discriminatoire pour avoir participé à un mouvement de grève, sauf dispositions plus favorables pour le salarié. Toute mesure prononcé en méconnaissance de cette protection est nulle de plein droit (sauf en cas de faute lourde imputable au salarié).
En principe, est discriminatoire l’attribution d’une prime aux salariés selon qu’ils ont participé ou non à un mouvement de grève. Ainsi, le versement d’une prime ou d’un avantage aux seuls salariés non-grévistes est discriminatoire.
Toutefois, dans un arrêt en date du 3 avril 2024, la Cour de cassation a admis la possibilité pour l’employeur de verser une prime exceptionnelle à des salariés non-grévistes si elle est justifiée par un surcroît de travail assumé durant la grève ou la réalisation de tâches en dehors de celles prévues par leur contrat de travail.
En l’espèce, plusieurs salariés avaient agi en justice pour obtenir un rappel de salaire correspondant à une prime exceptionnelle versée à des salariés non-grévistes. Ils s’estimaient avoir été victimes de discrimination dans l’exercice de leur activité syndicale et de leur droit de grève. Les juges avaient condamné l’employeur au paiement de sommes à titre de rappel de salaire. L’employeur justifiait le versement de cette prime par le fait que les salariés non_grévistes avaient réalisé des tâches supplémentaires qui ne relevaient pas de leurs fonctions.
Pour les juges, le pouvoir de direction de l’employeur lui permettait de modifier unilatéralement les conditions de travail des salariés. Les juges estimaient que les salariés non-grévistes avaient exécuté les taches demandées conformément aux ordres de l’employeur qui leur avait donc accordé un avantage salarial de manière discrétionnaire. L’employeur avait formé un pourvoi en cassation.
La Cour de cassation a censuré la décision des juges du fond. Elle retient que « ne constitue pas une mesure discriminatoire l’attribution à certains salariés non-grévistes d’une prime exceptionnelle correspondant à un surcroît de travail ou à la réalisation de tâches en dehors de celles prévues par leur contrat de travail ».
La Cour a reproché aux juges de n’avoir pas vérifié si la prime n’avait été versée aux salariés ayant accepté une modification temporaire de leur contrat de travail, en raison de l’exécution de tâches ne relevant pas de leurs fonctions, de sorte qu’elles constituaient un surcroit de travail.
Le versement d’une telle prime doit être strictement justifié par un surcroit d’activité, qui doit être prouvé, pour éviter toute discrimination.
Consulter l’arrêt de la Cour de cassation en date du 3 avril 2024 : https://urlz.fr/qmMV
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