Lettre au Premier ministre, François Bayrou

Il est urgent de disposer de politiques publiques adaptées aux besoins des publics fragiles et des entreprises qui les accompagnent (personnes dépendantes, handicapées, accueil des enfants) dans les territoires afin de permettre à tous de bien grandir, bien vivre et bien vieillir.

Monsieur le Premier ministre,

 

 

Le Président du MEDEF, Patrick Martin, vous a récemment alerté sur la gravité de la situation économique que traverse notre pays. Les défaillances d’entreprises se multiplient et la fiscalité pèse lourdement sur nos entreprises comme sur nos concitoyens. Face à cette situation critique, l’heure n’est plus aux demi-mesures : nous avons besoin de décisions fortes et d’une impulsion au plus haut niveau de l’État, pour la pérennité de notre économie, des emplois et de l’avenir des Français.

Mais l’entreprise, ce n’est pas uniquement la croissance, elle est aussi une actrice incontournable de nos territoires pour créer de l’emploi, du service et accompagner un dynamisme économique, indispensable à la survie et l’équilibre des territoires, des zones rurales. Ce rôle est plus particulièrement joué par les entreprises de service à la personne.

Qui sommes-nous ? Des micro-crèches, des crèches, des entreprises de garde d’enfant à domicile qui accompagnent chaque jour des familles partout en France afin que les parents puissent concilier vie professionnelle et vie personnelle, afin que les entreprises puissent se développer avec des salariés en capacité d’être disponible.

Et pourtant les entreprises dans le secteur de la petite enfance, et notamment les micro-crèches risquent aujourd’hui, du fait de la volonté des précédents ministères de ne pas composer avec elles, d’être condamnées à disparaître, alors que ce sont notamment elles qui contribuent plus particulièrement à redynamiser l’offre de place. Le secteur privé réalise depuis plus de 10 années plus de 90% des créations de place nouvelle, 80% de ces places sont créées par des micro-crèches, notamment dans les zones rurales. Pourtant ce modèle n’est pas accompagné par les pouvoirs publics, et plus encore, il est remis en cause par des mesures modifiant leurs règles organisationnelles et structurelles au 1er janvier 2026, sans que ces règles puissent être mises en œuvre aux vues de la situation du secteur (pénurie de professionnel, manques de places de formation, etc.) et de l’équilibre économique des structures.

Qui sommes-nous ? Des entreprises d’aide à domicile, qui accompagnent le maintien à domicile et le bien vieillir des personnes en situation de handicap et/ ou de perte d’autonomie. La France est confrontée de plein fouet au vieillissement de sa population dont la part de personnes âgées ne cessera de croitre dans les prochaines années. Et alors que 2,4 millions de personnes sont aujourd’hui en situation de perte d’autonomie, ce chiffre va doubler dans les prochaines années. Ce sujet en fait l’une des préoccupations principales des Français qui pour 90% d’entre eux souhaitent pouvoir vieillir à domicile. En ce sens, les Services d’aide à domicile, prestataires ou mandataires, les résidences services séniors ou encore les télé-assisteurs apportent l’une des réponses les plus performantes pour faire face à cet enjeu sociétal majeur.

Les entreprises dans le secteur du maintien à domicile représentent 45% de l’activité réalisée par des structures sur l’ensemble du territoire national et emploient plus de 180 000 salariés. Et pourtant les entreprises dans le secteur sont vouées à disparaître tant le modèle économique est fragile. Le nombre de défaillances d’entreprises n’a jamais été aussi élevé.

Ces défaillances entrainent des destructions d’emplois et par conséquent des personnes qui ne peuvent plus être accompagnées afin de pouvoir rester au domicile. Cet effondrement est le fruit d’une tarification et d’une solvabilisation de l’aide à domicile qui sont bien en deçà du besoin des structures et des bénéficiaires.

La Fédération des entreprises de Services à la personne (FESP), Fédération leader du secteur des entreprises, représente plus de 3 600 entreprises de SAP, allant de la TPE aux groupes leaders, qui emploient plus de 140 000 salariés dans tous les territoires, des personnes souvent éloignées de l’emploi et faiblement diplômées qui contribuent non seulement à la vie économique du pays et de ses territoires, mais aussi actrices incontournables de la cohésion sociale.

Aujourd’hui, la place des entreprises dans le secteur est menacée alors qu’elles sont indispensables dans le quotidien de centaines de milliers de familles et notamment pour les publics les plus fragiles.

Il y a 20 ans, le secteur des services à la personne s’ouvrait aux entreprises pour répondre à des besoins sociaux croissants et mesurés. Nous avons relevé ce défi en créant des emplois non -délocalisables au plus près des territoires et en nous adaptant sans cesse aux besoins, aux envies et aux nouveaux modes de vie, dans l’intérêt des Français. Pourtant, chaque jour, et alors même que nous avons prouvé notre efficacité, les règles qui encadrent ces activités excluent les entreprises peu à peu !

Face à cette situation critique, nous sollicitons votre intervention sur plusieurs axes prioritaires.

En premier lieu, la création d’un ministère dédié à l’Économie de proximité s’impose pour porter une vision stratégique de notre secteur et coordonner efficacement les politiques publiques en faveur des services à la personne.

 

Il est indispensable de sécuriser et stabiliser les dispositifs de soutien aux familles pour le financement des services à la personne, afin d’assurer la pérennité économique de nos structures et garantir l’accessibilité de nos services à tous les Français.

 

Il est par ailleurs urgent de disposer de politiques publiques adaptées aux besoins des publics fragiles et des entreprises qui les accompagnent (personnes dépendantes, handicapées, accueil des enfants) dans les territoires afin de permettre à tous de bien grandir, bien vivre et bien vieillir.

Aujourd’hui, 1 salarié sur 6 est en situation d’aidance. Sans une volonté politique forte de prendre en compte les enjeux sociaux et sociétaux que sont ceux de la garde d’enfants ou encore du bien vieillir, et du rôle des services à la personne et des entreprises du secteur, c’est la situation toute entière du pays, des familles et de l’emploi qui en sera impactée.

 

Enfin, nous attendons un plan de simplification administrative et un soutien renforcé aux entreprises du secteur, particulièrement dans le contexte économique actuel, pour préserver les emplois non -délocalisables que nous créons dans tous les territoires.

 

Monsieur le Premier ministre, l’urgence de la situation exige des actes forts. Notre secteur, qui représente un pilier essentiel du modèle social français, ne pourra continuer à assurer sa mission sans un soutien concret de l’État. Les entreprises de services à la personne ont prouvé leur capacité à innover et à s’adapter. Nous sommes prêts à nous engager dans les transformations nécessaires, mais nous avons besoin de votre action immédiate pour préserver ce modèle unique qui allie performance économique et cohésion sociale.

 

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de ma plus haute considération

 

 

Brice Alzon

Président de la FESP

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